__________________________
Naaaan, je n'ai pas pu résister xD
Avis au lecteur : lis
Quelques notes et flocons, du boo-book, avant de lire celui-ci...
__________________________
On se les gèle.
J’ai encore eu la merveilleuse idée de sortir dessiner en hiver. Si je tombe encore malade, je saurais bien pourquoi.
Au moins cette fois mes cheveux étaient secs, pas comme celle du saule pleureur…Oui, le saule pleureur au bord de la rivière, que j’ai dessiné sous la neige… ce qu’il est beau, cet arbre ! Je dessinerais tous les arbres, l’hiver, s’il ne faisait pas aussi froid.
Mais l’été me chagrine, aussi, car les feuilles cachent tout ce que j’aime des arbres, et un grand soleil sur une feuille fait plus de mal qu’un peu de neige, à mes yeux noirs.
Mais aujourd’hui il gèle, vraiment.
Je ne sais pas ce qu’il m’a pris de sortir à nouveau. Mes gants ne m’isolent pas du froid, si peu, j’ai froid.
J’ai déambulé jusqu'au lac, tout à l’heure… traversé les jardins, croqué un oiseau sur une branche. Que j’aime les oiseaux !
J’ai vu un chat, hier, au bord de la rivière, et délogé trois familles de canards, juste en marchant au dessus d’eux. J’ai ris. Il a du me prendre pour une folle, ce passant-là…mais bon, j’aurais comme l’habitude de ça.
Si j’avais porté mon carnet, hier, j’en aurai dessiné des choses.
Alors, tout à l’heure, je l’ai pris. Même s’il était tard, je l’ai pris.
Un carnet, un stylo (pour ne pas hésiter à mordre), un bonnet et mes clefs.
J’ai même oublié le téléphone, je crois. Je vis comme une sauvage.
J’ai fait le tour du lac, une fois.
Et croqué, dessiné encore.
Le paysage gelé.
Essais de glace, de neige, d’écorce, de mousse. Je pourrais faire tellement mieux, si je ne gelais pas.
Mais j’aurais tellement moins à voir, si il ne gelait pas…
Trouvé une pièce au fond d’une poche, pris un thé au bar le plus proche. Laissé tomber la nuit, en me réchauffant.
Ce n’est pas prudent, je le sais. Mais c’est un soir de pleine lune, je le sens dans mes veines, et puisque je suis déjà là, je ne veux rien manquer.
Refaire le tour du lac, de nuit.
Je peux même dessiner de nuit, quand la pleine lune se lève, mais je sais que ça ne rendrait rien. Car les formes sont toutes les mêmes, c’est la couleur qui change. Comment rendre la lune avec un stylo bic ?
Alors je marche.
J’admire.
J’explore.
Et je respire.
L’air glacial qui me clouera au lit demain.
Pour un morceau de pleine lune, qui ne m’aurait, de toute manière, jamais laissé dormir.
Je la connais.
Je crois que j’ai passé la nuit, tenue debout par la pleine lune, et les étoiles. Et une envie, bizarre, de ne pas rentrer ce soir.
Il ne fait pas tout à fait jour, même pas bientôt, mais déjà des joggeurs me croisent, haletant fort.
Je marche encore, gelée dans tous mes membres, le carnet pressé sur mon cœur.
Ça fait des heures que j’avance dans le silence. J’attends que l’irréel de cette nuit s’efface et me rende assez de conscience pour continuer jusqu’à chez moi, prendre un bain chaud, un petit déjeuner, dormir.
Je vois passer les gens, et je les dévisage. Comme d’habitude.
Je respire leur odeur et leur souffle, me laisse emporter par leur course…bascule la tête de côté, à chaque passage.
L’humanité.
Et puis il y a ce scribouilleur – il a une mise de scribouilleur – qui s’agite devant moi, malmenant son carnet. Tu écris, toi, n’est-ce pas ? Il ne me répond pas, car j’observe depuis le silence.
Mais je vois dans ses yeux tout un fantasme étrange, qui me transforme de la tête aux pieds, en personnage de fiction. Ils sont comme ça les scribouilleurs, ils ne voient pas l’humanité. Les images leur suffisent.
Une sourire croisé plus tard – je ne peux pas m’empêcher, vraiment, de me marrer à voir sa mine – je bascule la tête de côté, comme pour les autres. Classé.
Ah non ? tient, voilà qu’il me parle.
Heureusement la zombie polie – celle qui prend la relève quand la sauvage dort trop profondément – l’accueille simplement.
C’est un scribouilleur, pas un lourd. Et j’adore, quoi que je puisse en dire, apprendre à connaitre les gens.
Vas-y, suis-moi… et parle, j’ai trop froid pour articuler.
Je ne m’étais pas tant trompée. « gribouilleur ? » qu’entend-il par là ?
Tu veux voir mon carnet ? oh, bien.
Je n’ai même pas conscience des mots que je prononce. Je sais qu’il les transformera, de toute façon, avant de les entendre.
Il me fait un éloge ? ahah ! toi tu ne sais pas dessiner…je me trompe ?
Bon, voilà qu’il neige.
Ah oui, merci, protégeons le saint carnet !
J’ai froid, je veux rentrer, mais il me tient la jambe.
Alors bon, je ne suis pas pressée.
Mais curieuse, ça, perpétuellement.